Janvier 2026
Dans cette DEMO, nous présentons le travail créatif, la méthodologie et les principales questions de recherche menées par PULSE, un collectif de chercheurs, performeurs, designers, artistes, éducateurs et étudiants aux cycles supérieurs, dans le cadre d’activités de recherche-création à l’Université Concordia.
En 2025, PULSE a commencé à organiser des activités hebdomadaires de recherche-création axées sur le thème de l’hospitalité radicale. Le collectif, dirigé par la professeure, artiste et chercheuse Shauna Janssen, s’est réuni, de janvier à juin, tous les mercredis après-midi.
Les activités de recherche s’appuient sur le projet en cours de Janssen, this space is for you. Ce projet vise à offrir une plateforme centrée sur la phénoménologie queer, les pratiques de design scénographique pluriverselles et les études féministes en technoscience, envisagées comme des méthodologies incarnées pour créer avec des technologies de capture. Il explore la capacité des environnements immersifs à révéler et mettre en scène les atmosphères de l’hospitalité.
this space is for you 2.0 examine le concept d’hospitalité radicale de manière incarnée et expérientielle en utilisant des technologies de capture, guidée par des questions de recherche clés telles que :
- Comment les environnements en réalité étendue (XR) peuvent-ils être vécus comme des espaces hospitaliers ?
- Que peuvent nous apprendre les engagements somatiques et corporels avec les technologies de capture sur la mise en scène d’environnements inclusifs et pluralistes ?
Les ateliers hebdomadaires d’hiver sont devenus des rituels. Le collectif se réunissait autour d’une grande table ovale pour faire un tour de parole, ce qui instaurait une confiance propice au partage mutuel sur ce qui résonnait chez chacun autour du thème de l’accueil et des sentiments liés à l’hospitalité. Le collectif échangeait des cadeaux — objets, textes, récits, nourriture — et d’autres offrandes lors de la plupart des séances. Leurs activités comprenaient également la création de partitions de mouvement issues d’explorations somatiques, dirigées par Gabi Petrov.





Improvisation somatique et rétroaction numérique
Les improvisations somatiques et les séances de création de partitions ont été capturées à l’aide du logiciel TouchDesigner (TD) et de capteurs Intel RealSense pour enregistrer les mouvements des performeurs.
Les premières expérimentations avec la technologie ont permis aux performeurs de percevoir leur propre agentivité et leur relation avec les capteurs, afin de comprendre comment leurs mouvements et décisions dans l’espace pouvaient interagir. Tout au long des séances de création, les performeurs ont pu observer leurs doubles numériques, transformés en particules et textures projetées sur un mur. Ces séances visaient à dépasser la vision conventionnelle de la technologie comme simple moyen, pour embrasser plutôt les qualités performatives que les technologies de capture peuvent mobiliser, créant ainsi de nouvelles formes d’engagement et de relationalité.
En utilisant une scène verte, les mouvements et gestes des performeurs ont été capturés alors qu’ils répondaient aux partitions via TouchDesigner. Ces enregistrements ont ensuite été traités par un système de particules qui transformait les corps en formes visuelles abstraites et mouvantes. Projeter ces visuels sur la scène invitait les performeurs à se réengager avec les traces de leurs actions précédentes tout en interprétant de nouvelles partitions, créant ainsi un jeu continu entre corps, image et technologie.
Cette boucle de rétroaction numérique-physique est devenue centrale dans les considérations dramaturgiques du développement du projet. L’interaction entre la technologie et les performeurs exigeait leur coprésence dans un environnement spatial composé de capteurs, systèmes de projection, écrans et tours informatiques, câbles et éléments scénographiques, tels qu’une chaise, un plancher de danse, un sol et un fond vert. Dans cet environnement, les performeurs, l’espace et la technologie n’étaient pas des entités distinctes, mais des agents qui s’influencent mutuellement, chacun façonnant la dynamique évolutive de l’œuvre.





En résidence : créer et habiter un espace
Les activités de résidence comprenaient la création d’une série de partitions performatives, issues d’explorations somatiques qui ont fait émerger, pour reprendre les mots d’Esteban Donoso, « des questions de temps, de répétition, d’échos et de traces, ainsi que l’affectation mutuelle des corps et des espaces — remettant en question la dichotomie entre le réel et le virtuel dans la performance avec des technologies de capture, et abordant les complexités qui s’y trouvent. Ces partitions, largement dérivées du travail somatique, invitaient les participants à réfléchir à la manière de créer et d’habiter un espace à la fois familier et étranger, toujours insaisissable, de manière à accueillir le pluriel, le queer et l’inattendu. »




Travailler avec TouchDesigner durant la résidence impliquait l’orchestration de la capture vidéo, du traitement numérique et de la projection sur scène en étroite collaboration avec le collectif. Les performeurs ont été initiés aux besoins technologiques pour capturer la forme et les mouvements de leur corps, les sensibilisant ainsi aux paramètres spatiaux clés.
Dans cette configuration, les explorations étaient enregistrées à partir de capteurs en vue frontale et en plongée, mais la zone verte définissant l’espace de capture ne couvrait pas toute la scène. En prenant compte et en s’adaptant aux contraintes spatiales et techniques, les performeurs ont interagi avec elles de manière créative et ludique, approfondissant leur conscience de la présence et de l’agentivité de la technologie dans l’espace performatif.
Dans ce contexte, TouchDesigner n’était pas simplement un outil. En opérant le système, la technologie influençait et soutenait les mouvements des performeurs pendant le processus d’enregistrement — démarrant, mettant en pause et s’arrêtant en réponse à leurs gestes — sans les contraindre, laissant place à l’improvisation et à la spontanéité.
La dramaturgie avec TouchDesigner
Une approche dramaturgique du travail avec TouchDesigner a permis de se concentrer sur la création de séquences de nœuds interconnectés et d’impliquer la transformation des vidéos capturées en particules abstraites de corps en mouvement grâce à l’opérateur Particle GPU. Ce flux de travail valorisait l’ouverture et l’imperfection, considérant les défauts comme faisant partie intégrante du processus créatif et expérimental.
L’objectif de la transformation des mouvements capturés n’était pas de créer des répliques visuelles parfaites des corps en mouvement, mais plutôt d’explorer, à partir des recherches somatiques, un sentiment de présence — ou de coprésence — à travers des échos, des répétitions et des traces. Travailler avec l’interface TouchDesigner nécessitait de modifier la couleur et le comportement des particules, leur échelle, leur quantité, leur densité et leur opacité, ainsi que de jouer avec le délai, la dynamique du mouvement et le rendu des textures.
Ces considérations dramaturgiques ont produit des effets de glitch, des distorsions et des sensations étranges, enrichissant la boucle de rétroaction entre la performance en direct et la médiation technologique. Les mouvements et gestes des performeurs étaient suivis par des capteurs Intel RealSense et appliqués à Particle GPU via TD Optical Flow, permettant une interaction en temps réel entre les performeurs et les projections vidéo capturées et transformées.
En se concentrant sur la manière dont la technologie se ressent plutôt que sur son fonctionnement, l’expérience est devenue sensorielle — marquée par la vulnérabilité et l’incertitude.
Comme l’explique Janssen, « this space is for you 2.0 est à la fois un lieu conceptuel et un espace performatif émergent à partir duquel mettre en scène collectivement des gestes d’hospitalité et souligner le travail politique consistant à s’écarter des normes socioculturelles qui dominent la prolifération des environnements immersifs “world-building” avec les technologies XR. » Le projet engage des notions de tendresse numérique (Axelsson, 2024) comme considération dramaturgique pour la mise en scène d’environnements d’hospitalité, et la tendresse comme méthodologie pour entreprendre des expérimentations incarnées et collectives avec des technologies de capture.
— Texte par Kévin Pinvidic, membre étudiant, Université Concordia
Pour en savoir plus, visitez la page Web du projet PULSE
Shauna Janssen, PhD, is PULSE Creative Director and Principal Researcher. She is Associate Dean of Academic Programs & Pedagogy, Faculty of Fine Arts, Concordia University, where she also is director of the immersive storytelling studio at Milieux Institute for Arts, Culture & Technology and a co-investigator with Hexagram.
Artiste multidisciplinaire, Kévin Pinvidic Artiste multidisciplinaire, Kévin Pinvidic est actuellement doctorant à l’Université Concordia (programme INDI) et titulaire d’une bourse du CRSH. Son projet doctoral de recherche-création explore les multiples croisements entre la scénographie, les études urbaines, la géographie et les arts computationnels, en s’appuyant sur des méthodes performatives et collaboratives pour impliquer les citoyens dans les processus de transformation urbaine. Pinvidic a été formé en design et en architecture (École Boulle, Paris, 2008 ; École nationale supérieure d’architecture de Versailles, 2010) et détient une maîtrise en arts visuels (UQAM, 2015). Il est également scénographe actif et conçoit des dispositifs pour des performances en direct avec plusieurs compagnies de théâtre et de danse à Montréal.
Pour consulter la biographie des collaborateurs, visitez la page de l’équipe de Pulse.
Crédits pour this space is for you: explorer les atmosphères d’hospitalité radicale
Direction artistique
- Shauna Janssen
Équipe de recherche-création
- Laura Acosta
- JoDee Allen
- Esteban Donoso
- Steven Greenwood
- Syd Hosseini
- Peng Hsu
- Gabriela Petrov
- Kévin Pinvidic
Captures d’écran de TouchDesigner
- Kévin Pinvidic
Vidéo
- Kévin Pinvidic (contenu numérique)
- Syd Hamidreza Hosseini (montage)
Cette recherche est financée par le programme de fonds de démarrage et fonds complémentaires du Réseau Hexagram, l’Institut Milieux pour l’art, la culture et la technologie, le bureau du Vice-recteur à la recherche, à l’innovation et à l’impact de Concordia, ainsi que par Hemispheric Encounters (CRSH PG).




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